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Le plafonnement des services de garde à but lucratif freine la croissance du système

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9 juillet 2024
La Presse Canadienne, 2024
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Par La Presse Canadienne, 2024

TORONTO — Des municipalités de l'Ontario ont été obligées de refuser des milliers de places en garderie dans le système à 10 $ par jour en raison d'une limite sur le pourcentage de places à but lucratif dans l'accord entre la province et le gouvernement fédéral, a déclaré le gouvernement ontarien.

La province a jusqu'à présent créé moins d'un tiers des nouvelles places auxquelles elle s'était engagée d'ici 2026. Le ministre de l'Éducation de l'Ontario, Todd Smith, et l'Association des municipalités ont envoyé une lettre à la ministre fédérale Jenna Sudds pour lui demander de lever le plafond pour les centres à but lucratif.

«L'Ontario reconnaît le rôle important que jouent les centres sans but lucratif dans le système de garde d'enfants, mais ils ne peuvent pas répondre à la demande à eux seuls», ont écrit M. Smith et l'Association des municipalités de l'Ontario.

«Avec des listes d'attente aussi longues, les parents et les tuteurs de toute la province cherchent des services de garde de qualité pour leurs enfants dans leur communauté locale, qu'ils soient à but lucratif, sans but lucratif ou en milieu familial.»

Dans l'accord avec le gouvernement fédéral, l'Ontario s'est engagé — à contrecœur, suggère la lettre — à maintenir un ratio dans le système à 10 $ par jour de 70 % de places à but non lucratif et de 30 % de places à but lucratif. Mais ce ratio a artificiellement entravé la croissance du système national de garderies en Ontario, affirment la province et ses municipalités.

La région de Peel a été identifiée comme ayant les plus grands besoins, mais elle a dû refuser plus de 2000 places potentielles dans le cadre du programme à 10 $ par jour parce que les exploitants étaient à but lucratif, indique la lettre.

Pendant ce temps, les listes d'attente ont explosé depuis l'introduction du programme, qui a déjà vu les frais être réduits de moitié pour les parents dans les garderies participantes et ils devraient encore être réduits à une moyenne de 10 $ par jour.

À Kawartha Lakes, les parents devraient passer en moyenne 6,4 ans à attendre une place dans une garderie agréée, contre 3,7 ans en moyenne avant que l'Ontario se joigne au programme. Dans la région de Waterloo, le nombre d'enfants sur la liste d'attente a augmenté de 115 % pour atteindre 9200. À Ottawa, une hausse de 41 % a été observée.

Une porte-parole de Jenna Sudds, ministre de la Famille, de l'Enfance et du Développement social, a déclaré que la ministre répondrait à M. Smith pour poursuivre les discussions sur la manière dont l'Ontario peut atteindre ses objectifs.

«Lors de la création du système pancanadien, notre priorité était et demeure d'accroître l'accès à des services de garde de haute qualité, abordables, flexibles et inclusifs partout au Canada», a écrit Geneviève Lemaire dans un communiqué.

«En tant que dernière province à signer l'entente, l'Ontario a fait des progrès. Cependant, comme nous pouvons tous en convenir, il reste encore du travail à faire», a-t-elle ajouté.

L'accord avec l'Ontario engageait la province à créer 86 000 nouvelles places depuis 2019, même si l'accord a été signé en 2022. Mais jusqu'à maintenant, bien qu'il y ait eu environ 51 000 nouvelles places depuis 2019 pour les enfants de cinq ans et moins, le groupe d'âge couvert par le programme national, seulement 25 500 d’entre eux relèvent du système à 10 $ par jour.

Une formule à revoir?

Les exploitants et les défenseurs des services de garde ont également reproché à la formule de financement de l'Ontario d'étouffer la croissance - ils affirment qu'elle ne couvre pas leurs coûts et la province a promis de réviser bientôt la formule - ainsi que les niveaux de rémunération du personnel.

L'Ontario a fixé à 23,86 $ l'heure le salaire plancher pour les éducateurs des centres participant au programme, un montant qui devrait augmenter de 1 $ l'heure chaque année jusqu'en 2026. Ce montant est supérieur au niveau initialement fixé par la province, mais les défenseurs soutiennent qu'il est encore trop bas pour faire une différence significative dans la crise de recrutement et de rétention qui secoue la province.

Les responsables du ministère ont prévenu que la province pourrait faire face à un manque de 8500 éducateurs d’ici 2026. Les défenseurs et les opérateurs affirment que si l'on ne parvient pas à mieux les attirer et les retenir, il n'y aura personne pour pourvoir les emplois qui seront créés.

Selon Carolyn Ferns, la coordonnatrice des politiques de la Coalition ontarienne pour de meilleurs services éducatifs à l'enfance, qui milite en faveur d'un système public et sans but lucratif, l'Ontario doit s'attaquer à sa propre formule de financement et à ses problèmes de main-d'œuvre avant de chercher à développer les garderies à but lucratif.

À son avis, les exploitants des centres ont du mal à joindre les deux bouts avec la formule de financement actuelle et à attirer suffisamment de travailleurs pour les installations existantes.

«Pourquoi construiriez-vous une extension à votre maison alors que votre maison est en feu?» lance Mme Ferns.

«Je pense que le gouvernement Ford doit examiner la mise en œuvre (du système à 10 $ par jour) et bien faire les choses, et ne pas s'engager dans la voie d'une vente du système au plus offrant.»

La lettre indique que les exploitants à but lucratif de l'Ontario sont en grande partie de petites entreprises appartenant à des femmes et que 96 % d'entre elles exploitent seulement un ou deux sites.

Allison Jones, La Presse Canadienne